Revue du jeu Dinogenics

Fiche technique

  • 1 à 5 joueurs (même avec les extensions)
  • 14 ans et plus (14 ans pour le constructeur)
  • 2 à 3h environ (joueurs habitués)
  • Jeu de gestion avancé (planification d’actions et optimisation d’enclos)

Présentation

Dans Dinogenics, vous êtes le directeur d’un parc à dinosaures. Dans un futur lointain, le séquençage d’ADN de reptile géant, à partir d’échantillons fossiles, n’est plus un rêve : la société Dinogenics démocratise et industrialise le procédé, ce qui permet à une poignée d’hommes d’affaires ambitieux de se lancer dans les parcs à thèmes à base de brontosaures, ptérosaures et autres ichtyosaures.

Parviendrez-vous à rassembler les espèces les plus curieuses et les plus prestigieuses ? Remplirez-vous vos enclos de mutants contre-nature et cannibales, ou bien organiserez-vous des safaris de chasse en jeep pour proposer des trophées antédiluviens à vos riches clients ?

Grâce aux petits génies à lunettes des labos de Dinogenics, il ne vous reste plus qu’à décider si vous ne mettrez que des mâles ou des femelles, des carnivores ou des herbivores… Mais en tout cas, il faudra mettre quelque chose, car au premier tour, il n’y a rien du tout, dans votre parc à dinos… (Ce qui est un peu frustrant lors de la première partie).

Attention, toute ressemblance avec une série de films iconiques de la culture geek est purement fortuite.

Evaluation

Règles

Le corpus principal des règles est plutôt simple et efficace : différents moyens de collecter et écrêmer de l’ADN de différentes espèces dinosaures, dans le but de les défausser pour placer des meeples de dinosaures dans son parc ; construire des bâtiments et embaucher des contractuels pour scorer sur les combos d’espèces ou le nombre de visiteurs ; engranger dollars et des points de victoire à chaque tour. Voilà le cœur du système ; malheureusement, cet ensemble de règles simples et éprouvées est entouré d’une salade assez épaisse d’exceptions, de règles annexes, de précisions secondaires et autres actions optionnelles et périphériques.

Certaines mécaniques donnent l’impression d’être cependant un peu trop complexes pour ce qu’elles apportent. Il en va ainsi par exemple du marché ADN, aux règles d’alimentation, de recharge et de décalage pas forcément évidentes, et qui introduisent des subtilités tactiques surnuméraires.

Il en va de même de la zone « Cimetière », dont on ne comprend pas très bien pourquoi elle doit rester visible (car on y pioche rarement de toute façon), et en particulier comment faire pour garder le dégradé de cartes défaussées entièrement visible sans recouvrir les autres zones proches, dès lors qu’on a plus de 4 dinosaures ad patres. Cette zone n’est qu’un des rares moyens de générer volontairement du scandale.

Or, le scandale, qui se présente comme la « ressource risquée » du jeu, ne tient pas vraiment ses promesses. Sur le papier, l’idée est alléchante : le Scandale vient avec des actions lucratives ou bénéfiques, mais fera perdre des points en fin de partie si l’on ne s’en débarrasse pas avant la fin du jeu. C’est une sorte de pari ou de prise de risque : gagner plus tout de suite, au risque de payer les pots cassés plus tard. Pourtant, on peut très rapidement les éliminer sans que cela soit un choix crucial, à moins de les oublier en cours de partie ou que tous les joueurs fassent scandale sur scandale comme des sagouins.

Passons aussi sur des dés de carnage, dont les effets sont de toute façon rapidement résorbés et qui de pénalité peuvent devenir récompense, introduisant une certaine injustice en plus de l’aléatoire ; dés de carnage ? Ils portent bien mal leur nom. On pourrait encore évoquer l’idée saugrenue de gérer la « pêche au gros » avec une autre catégorie supplémentaire de dés, les « dés océan », avec leurs propres symboles et leurs propres règles.

Car Dinogenics, c’est un peu ça : plein de bonnes idées de règles, mais leur accumulation ne donne pas un tout très homogène. On peut aimer la pizza et les crêpes, mais les crêpes anchois tomate c’est pas forcément idéal.

Note : 6/10

Le plateau de l’extension ajoute des options de jeu, mais vous pouvez facilement passer toute la partie… à vous en passer, sans que cela vous pénalise. Bref, plus de diversité et d’options de mécaniques de jeu, mais rien d’incontournable ni de révolutionnaire.

Thème

Dinogenics arrive assez bien, au final, à retranscrire un peu les rêves de John Hammond, bien que la licence officielle et le logo du squelette du T-Rex, si cher à Jurassic park, ne soient pas présents. Entre les chaînes d’info annonçant les tiphons et autres invasions de compsognathus dans les hôtels, les carnivores brisant leurs clôtures pour croquer les visiteurs, et autres chasse aux fossiles à travers le monde, vous serez plongé dans la peau d’un directeur de parc mégalomane et prêt à tout pour promouvoir « ses » dinos et vendre les billets de son parc adoré.

Quelques éléments des « Parcs à dinosaures » laissent cependant à désirer. Ridiculement petits, les bâtiments ont des tailles parfois curieuses (les volières sont plus petites que des piscines… ?) et la distinction entre bâtiment « de parc » et bâtiment « de goudron » est un peu absconse. De plus, la chasse aux dinosaures (ou les dinosaures en chasse) est un aspect du jeu qui reste finalement abstraite et épisodique, ce qui enlève quand même une bonne partie du sel des films originaux.

On peut en dire autant de la zone « Cimetière » : pourquoi permet-elle de récupérer de l’ADN plus facilement que dans les super-labos de Dinogenics ? Et au final, qui est derrière Dinogenics ? Il aurait été intéressant de proposer un jeu asymétrique, avec un joueur dirigeant de la société de bio-ingénierie (un peu comme la Guilde qui est dirigée par un des joueurs, dans le jeu de stratégie classique Dune). En proposant des avantages équivalents aux autres concurrents, par exemple le roi des paquebots acheminant les touristes, le dirigeant politique étouffant les scandales, etc…

Mais le plus gros regret, si l’on veut chipoter, c’est l’absence de la licence Jurassic Park. Après tout, bâtir un parc à dinosaures sur une île tropicale sans John Hammond, chasser les raptors sans Robert Muldoon, ou faire naître des T-Rex en éprouvette sans coller dessus une étiquette « InGen », c’est quand même un peu dommage.

Enfin, ne boudons pas notre plaisir, le thème est ici respecté, bien amené et savamment illustré.

Note : 8/10

Les quelques Meeples à votre disposition représentent vos braves ingénieurs, tandis que votre plateau individuel vous permet de déployer vos hôtels, vos enclos à dinos… Et vos chèvres d’élevage ! On reconnait là un détail du film Jurassic Park 1 qui prouve le respect et l’amour des concepteurs du jeu pour la saga originale.

Matériel

Puisque l’on parle ici d’un jeu de dinosaures, voyons ce qu’il en est de ces bêbêtes à écailles : les dinosaures sont représentés à la fois par des cartes à jouer et par des meeples. De ce côté, on est donc doublement servi : non seulement les cartes ADN nous proposent un portrait de chaque espèce en jeu (et il y en a une bonne quinzaine, si vous jouez avec toutes les extensions !), mais elles sont accompagnées de pions en bois de formes, de tailles et de couleurs différentes. Matériel luxueux et varié, donc !

Vous pourrez ainsi voir avec satisfaction vos créatures antédiluviennes s’ébattre paresseusement sur vos plages, ou bien à l’abri derrière vos barrières électrifiées, elles aussi taillées et peintes dans du bois poli. Quelques pions et jetons annexes complètent agréablement ce matériel de luxe.

Le plateau principal n’est pas en reste ; à une ou deux fioritures (comme la zone du Cimetière, évoquée plus haut), il est bien assez grand pour que l’on puisse y placer les ouvriers qui débloquent les actions. Cela permet d’en apprécier le paysage bucolique et tropical, sans trop distraire les joueurs.

Les pions des nouveaux bâtiments, rajoutés et accumulés à chaque tour, sont relativement petits, et leur nom microscopique n’aide en rien à connaître leurs effets en jeu. Alors certes, on en retrouve beaucoup en plusieurs exemplaires ; il n’en reste pas moins qu’ils contribuent à alourdir un peu les premiers tours.

On regrettera que les extensions et modules optionnels, fournis avec le jeu, ne s’intègrent pas tous parfaitement avec le plateau principal. Certaines piles de carte n’ont pas d’emplacement prévu pour leur défausse (ADN « amélioré »), le Cimetière peut vite être saturé et déborder sur les zones de pions, et les noms des tuiles de bâtiment ont été rédigés en police taille 2… Mais ce ne sont que des défauts très marginaux pour un jeu somme toute beau et agréable tant à voir qu’à manipuler.

Note : 7/10

Ce plateau de jeu montre la diversité du matériel, avec les Meeples, les tuiles, les jetons de monnaie… Et la piste de prestige pour engranger des points à chaque tour (avec le cube de la couleur du joueur, ici bleu).

Notre avis

Jeu long à expliquer, mais tours individuels rapides à jouer, Dinogenics vous demandera un peu d’investissement avant de révéler son plein potentiel. Adapter un monument du cinéma pour en faire un gros jeu de gestion, c’est un défi difficile à relever : pour nous, avec Dinogenics, le pari est tenu.

Note finale : 7/10

Un commentaire sur “Revue du jeu Dinogenics

Mieux vaut l'action que vaines palabres...